Carnet de repérage – Témoignages et images authentiques issus du voyage d’exploration de l’équipe marketing de Far East Tour à travers 7 provinces du Centre du Vietnam, réalisé en juin–juillet 2025.

Ce matin-là, un fin brouillard enveloppait encore la ville. L’air était frais, et les rues de Kon Tum se réveillaient doucement. Je suis partie à pied, curieuse de découvrir cette fameuse église en bois construite sans clous, dont plusieurs voyageurs m’avaient parlé avec un mélange de respect et d’émerveillement. 

Une église pas comme les autres 

La cathédrale Immaculée-Conception de Kon Tum ne ressemble à aucune autre église que j’aie visitée. Pas de pierre froide, pas de marbre imposant. Ici, tout est bois, chaleur, tradition. 

Construite entre 1913 et 1918 par le prêtre missionnaire français Joseph Décrouille, cette église catholique étonne par son architecture en bois Vietnam unique, entièrement faite de bois cà chít, un bois dense et résistant, insensible aux termites. Le bâtiment repose sur une technique ancestrale de tenon-mortaise, sans aucun clou métallique. Déjà, cela force le respect. 

En s'approchant, on découvre un clocher élancé, des toitures pentues comme dans les maisons sur pilotis Ba Na, et un jeu subtil entre le style roman occidental et les codes architecturaux indigènes. C’est cette fusion entre deux mondes – l’Europe missionnaire et la culture locale Ba Na – qui donne tout son caractère à l’édifice. 

Une entrée solennelle 

Avant de pénétrer dans la cathédrale, un panneau discret nous invite à retirer nos chapeaux et à adopter une tenue correcte, marque de respect envers ce lieu sacré. J’entre, les pas feutrés sur le plancher qui craque doucement, comme pour nous rappeler qu’il est bien vivant. 

Le volume intérieur m’éblouit aussitôt : une charpente voûtée en bois sombre, soutenue par d’immenses colonnes de plus de 12 mètres, de la terre crue et de la paille tressée dans les murs, des vitraux colorés projetant une lumière tamisée et chaleureuse. Le regard se lève, s’élève avec l’architecture. Chaque poutre, chaque panneau est décoré de motifs traditionnels bahnar : poissons, oiseaux, feuillages, soleil stylisé… 

Une foi enracinée dans la culture locale 

Là où cette église catholique des Hauts Plateaux touche au sublime, c’est dans sa capacité à parler la langue du peuple qu’elle accueille. Ici, la messe n’est pas célébrée en latin ni en vietnamien… mais en bahnar, la langue locale. Les chants liturgiques sont accompagnés de gongs, de tambours traditionnels, du tơ nưng, une cithare de bambou. Une harmonie rare entre foi chrétienne et identité autochtone. 

Même les statues reflètent cette intention. La Vierge Marie, représentée en femme bahnar, vêtue de motifs ethniques, n’a rien à voir avec les madones européennes en robes bleues et blanches. Ici, la foi est incarnée, familière, accueillante. 

Les murs extérieurs racontent aussi une histoire : autour de l’église, des frises de visages solaires, d’inspirations animistes, témoignent de la cohabitation respectueuse entre catholicisme et croyances anciennes. Deux cây nêu (poteaux rituels) typiques des fêtes traditionnelles, ornent l’espace : décorés de symboles de barques, d’animaux, de plantes, peints en rouge, noir, jaune, vert — ils rappellent que la spiritualité ici est une chose vivante, enracinée dans la terre et le quotidien. 

Un ensemble patrimonial vivant 

La cathédrale ne se visite pas seule. Elle fait partie d’un complexe de plus de 700 m² comprenant un séminaire, un musée, un orphelinat, et un petit atelier d’artisanat local. À l’intérieur du musée du séminaire catholique de Kon Tum, on découvre des objets missionnaires anciens, mais aussi des costumes tribaux, des outils agricoles, des instruments de musique traditionnels. L’histoire de la mission catholique de Kon Tum s’y raconte, sobrement mais intensément. 

Le marché artisanal jouxtant la cathédrale expose du brocart tissé main, des objets en bois, des produits typiques de la région (poivre, café…). Une belle manière de soutenir les communautés locales. 

Vivre la cathédrale de l’intérieur 

Ce qui m’a le plus touchée, c’est que cette église n’est pas qu’un monument figé pour touristes. Chaque matin à 5h, les fidèles arrivent discrètement pour assister à la messe quotidienne. Le samedi et le dimanche, l’église résonne de chants, parfois jusqu’à trois célébrations par jour. 

Il y a aussi un espace de confession, discret, feutré. Ici, les croyants viennent confier leurs doutes, leurs fautes, recevoir un mot d’espoir. Un rappel que la foi catholique, ici, n’est pas coloniale ni imposée, mais choisie, vécue, transmise. 

Je suis restée longtemps, assise dans un coin, à écouter, à ressentir. Visiter la cathédrale en bois de Kon Tum, c’est plus qu’un passage architectural. C’est une rencontre. Une respiration. Un moment de paix. 

Et puis… le silence en sortant 

À la sortie, j’ai croisé une grand-mère en tenue bahnar traditionnelle. Elle m’a souri. Aucun mot n’a été échangé, mais son regard disait tout : cette église est à elle autant qu’à Dieu. 

En m’éloignant, j’ai jeté un dernier regard sur le clocher de 24 mètres, fièrement dressé au-dessus des toits de Kon Tum. Un symbole silencieux d’un dialogue possible entre les cultures, entre le sacré et l’humain. 

Infos pratiques – Visiter la cathédrale de Kon Tum 

• Nom complet : Cathédrale Immaculée-Conception de Kon Tum 

• Adresse : Centre-ville de Kon Tum, province du même nom, Vietnam central 

• Période de construction : 1913–1918 

• Matériau : bois cà chít, murs en torchis, construction sans clous (tenon-mortaise) 

• Style architectural : fusion roman européen + maison sur pilotis Ba Na, vitraux, motifs tribaux 

• Liturgie : messes quotidiennes dès 5h, majoritairement en langue bahnar 

• À voir aussi : musée du séminaire, orphelinat, marché artisanal de brocart 

•  Instruments utilisés : gongs, tambours, tơ nưng 

• Respect à observer : se couvrir les épaules/jambes, retirer son chapeau, éviter de faire du bruit pendant les messes 

Visiter l’église en bois de Kon Tum, ce n’est pas simplement contempler un joyau d’architecture religieuse au Vietnam. C’est entrer dans un lieu habité, vibrant, façonné par l’histoire d’un peuple et la foi de ses enfants. Un lieu qui parle à l’âme, même en silence.